Interview alumni : Lou Szkuta, excellence fournisseur specialist chez Alstom en Amérique.

Quitter la France, apprendre à négocier en anglais, découvrir une autre culture du travail… C’est le pari qu’a relevé Lou Szkuta en s’envolant pour les États-Unis dans le cadre d’un VIE. Aujourd’hui installée à Montréal, elle partage son parcours, ses expériences et les conseils qu’elle aurait aimé recevoir avant de partir.
Pouvez-vous vous présenter et revenir sur votre parcours ?
Je m'appelle Lou Szkuta, j'ai 26 ans et je suis originaire de Saint-Nazaire. J’ai suivi un bac ST2S, puis je suis partie un an en Australie où j’ai travaillé. De retour en France, j’ai effectué un BTS Commerce International à Saint-Nazaire, puis une licence en commerce et développement international à l’ENC de Nantes. J’y ai choisi la spécialisation en achats logistique.
Ma directrice m’a ensuite orientée vers l’ESAP, où j’ai intégré un master en achats. Je devais initialement être sur le campus de Saint-Nazaire, mais j’ai finalement été redirigée vers Paris, ce qui m’a permis de réaliser mon alternance chez Alstom, au sein du département Tender & Project. C’était en pleine période post-Covid, avec une forte inflation des prix industriels. J’ai validé cette année, et sans même terminer mon master, j’ai été recrutée pour un VIE aux États-Unis, aux côtés de la vice-présidente achats de la région Amérique.
Ce VIE de 18 mois à Pittsburgh a été suivi de 6 mois à Montréal, toujours en VIE, et aujourd’hui, j’ai été embauchée en CDI à la stratégie achats d’Alstom Amérique.
En quoi consistent vos missions actuelles ?
Je suis chargée de la gestion des risques fournisseurs pour la région Amérique. Mon rôle est de coordonner les différents acteurs afin de s’assurer que les fournisseurs ne poseront pas de problèmes dans les un à trois ans à venir. Cela concerne leurs finances, leur capacité à livrer, leur qualité, ou encore les risques géopolitiques.
Je travaille en étroite collaboration avec les acheteurs pour définir des plans d’action : ressourcement en cas de dépendance, développement fournisseur si des problèmes récurrents sont identifiés. J’analyse aussi les risques liés aux matières premières, aux réglementations, notamment entre les États-Unis et la Chine. Mon objectif principal est d’anticiper les signaux faibles.
Qu’avez-vous fait pendant votre mission de VIE ?
J'étais procurement efficiency analyst pour la vice présidente achats Amérique. J’ai participé à des plans de restructuration, travaillé sur l'efficacité des équipes, leur engagement, et la réduction du turnover. J’ai également géré des réclamations fournisseurs de plus d’un million d’euros.
Qu’est-ce qui vous a motivée à partir travailler à l’international ?
Depuis le lycée, j’ai toujours eu l’envie de partir voir ailleurs, au-delà de l’Union européenne. Dès mon bac en poche, je suis allée en Australie. Le VIE, au départ, je l’avais refusé pour finir mes études. Mais l’opportunité était trop belle : travailler dans un environnement international, avec une autre culture, une autre manière de penser.
Cette expérience m’a vraiment enrichie : ma manager new-yorkaise m’a appris à voir les choses autrement. J’étais très centrée sur le savoir-faire français.
Quelles différences avez-vous remarquées avec la France dans les manières de travailler ?
Le management est très différent. Aux États-Unis, il y a moins de hiérarchie visible. Les managers sont plus accessibles, plus centrés sur l’humain. On prend en compte les émotions, on essaie de comprendre l’autre. La reconnaissance est aussi plus présente, même dans les remarques d’amélioration.
Le rythme de travail est différent également : les journées sont plus courtes, les pauses moins longues, et on rentre plus tôt chez soi. Enfin, la rémunération y est davantage liée à la performance.
Comment vous êtes-vous adaptée à cette culture différente ?
J’ai beaucoup observé et écouté mes collègues. Les deux ou trois premiers mois, je n’osais pas trop prendre la parole. J’étais jeune, dans une langue qui n’était pas la mienne. Mais j’ai appris en écoutant, en imitant, tout en gardant mon identité française. Ce mélange fonctionne plutôt bien.
Et pour l’anglais, comment avez-vous progressé ?
Je pensais parler anglais, mais sur place, l’accent et les expressions m’ont déstabilisée. Pendant trois mois, je ne comprenais pas grand-chose. J’ai utilisé les outils de traduction sur Teams, mais surtout, j’ai forcé l’immersion avec les Américains. Il ne faut pas rester entre Français. Et je n’ai jamais eu honte de parler, même en faisant des fautes. Ma manager m’a aussi beaucoup aidée.
Pourquoi vous êtes-vous orientée vers les achats ?
Au départ, j’aimais la négociation en BTS. En licence, j’ai compris que le marketing n’était pas fait pour moi. J’ai donc opté pour les achats logistiques, pensant d’abord à la supply chain. De bons professeurs et des projets concrets m’ont donné envie d’aller plus loin. Et à l’ESAP, j’ai vraiment compris ce qu'étaient les achats. J’ai adoré.
Quel est votre meilleur souvenir à l’ESAP ?
Les workshops de négociation ! On était mis en condition réelle face à des professionnels. C'était intense, formateur et stimulant. Mais j’ai aussi apprécié l’ambiance de l’école, le mélange des profils et la qualité de notre directeur. L’ESAP a été la seule année où j’ai aimé aller à l’école !
Quel conseil donneriez-vous à un jeune qui souhaite travailler dans les achats ou à l'international ?
Il faut croire en soi, ne pas avoir peur de se lancer, même si on échoue. Dans les achats, il faut être sûr de sa valeur et de ce qu’on propose. L’audace, l’adaptabilité et la persévérance sont les clés pour réussir dans ce domaine.
